Pratiques collaboratives dans l’habitat social (2018-2021)
Conditions d’émergence, portée et nouvelles pratiques

1er juillet 2021

Financeurs L’Union sociale pour l’habitat, Banque des Territoires

Partenaires Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) ; Institut pour la recherche de la Caisse des Dépôts

Equipe de recherche Sabrina Bresson, maître assistante en sciences humaines et sociales, Ecole nationale supérieure d’architecture Paris Val de Seine, codirectrice du Centre de recherche sur l’habitat, UMR LAVUE ; Claire Carriou, maître de conférences en aménagement et urbanisme, Université Paris Nanterre, UMR LAVUE, équipe Mosaïques ; Séverine Bonnin-Oliveira, maître de conférences en aménagement et urbanisme, Université Aix-Marseille, LIEU ; Sylvaine Le Garrec, sociologue consultante, spécialiste de l’habitat ; Antonio Delfini, post-doctorant, chercheur associé au CLERSE, Université de Lille ; Camille Floderer, post-doctorante, Chercheuse associée au MESOPOLHIS (UMR 7064), Sciences Po Aix – Université Aix Marseille ; Yaneira Wilson-Wetter, post-doctorante, Chercheuse associée au Centre de recherche sur l’habitat, UMR LAVUE.

Organismes Hlm partenairesHauts-de-France : Clésence, Habitat du Nord, Lille Métropole Habitat Ile-de-France : Emmaüs Habitat, Hauts-de-Seine, Valophis Habitat Provence-Alpes-Côte d’Azur : Famille et Provence, Logement Familial, Côte d’Azur Habitat

Date 01 Juillet 2021

Séminaire sur les pratiques collaboratives dans l’habitat social (2018-2021)

Introduction

Dominique Belargent, L’Union sociale pour l’habitat

Nous sommes réunis aujourd’hui pour le séminaire final de cette recherche sur « les pratiques collaboratives dans l’habitat social » qui a commencé en 2018 sur une proposition de Claire Carriou et Sabrina Bresson. Je tiens à remercier tout particulièrement les neuf organismes et les trois associations régionales Hlm impliqués dans cette recherche ainsi que l’Agence nationale pour la cohésion des territoires (ANCT) et l’Institut pour la Recherche de la Caisse des Dépôts qui soutiennent ce projet aux côtés de l’Union sociale pour l’habitat et de la Banque des Territoires. Mes remerciements vont également aux adhérents du Club « Habitat Social pour la Ville » représenté par son président Hervé Leservoisier qui ont rejoint cette aventure et à l’ensemble des étudiants des trois universités (Université Aix-Marseille, Université de Lille, Université Paris Nanterre) qui ont contribué aux enquêtes de terrain et aux analyses lors de la première année de la recherche.
Depuis 2018, de nombreux travaux de terrain ont été réalisés auprès des neufs organismes Hlm qui ont répondu à l’appel à manifestation d’intérêt initial. Trois séminaires intermédiaires ont permis des échanges très précieux entre chercheurs et acteurs autour de la production des analyses et des résultats1.
La recherche confirme le très grand foisonnement des actions collectives dans l’habitat social qu’elles soient à l’initiative d’habitants ou des organismes Hlm. Elle montre que les questions sont tournées vers le « faire », ce qui est nouveau, et elle pointe le rôle des différences de contextes locaux dans la genèse de ces pratiques. Elle montre aussi que ce qui est en jeu, c’est la réorganisation du système de relations entre organismes Hlm et locataires.
Ces travaux nous invitent également à prendre de la distance par rapport au terme de « pratiques collaboratives », qui est certes bien « pratique » car assez flou pour prendre en compte toute une diversité d’expériences, mais en même temps certainement inadapté et trop « enchanté » pour rendre compte de tout le foisonnement d’actions collectives qui recomposent actuellement les relations entre les organismes Hlm et leurs locataires, et entre les locataires eux-mêmes.
Les pratiques collectives et collaboratives ne sont pas seulement un supplément d’âme, une cerise sur le gâteau, elles peuvent se révéler tout à fait essentielles, voire vitales, car c’est à travers elles que des collectifs ont pu affronter, surmonter des crises et en sortir plus solides, comme on l’a vu lors de notre dernier séminaire consacré au contexte de la crise sanitaire2. Et au-delà des périodes de crise, ces pratiques ont peut-être à voir avec le renforcement des micro-sociétés qui les voient naître. Elles peuvent aussi avoir des effets pour les individus eux-mêmes, en renforçant leur intégration sociale et en les rendant par-là peut-être plus résilients. La recherche montre également que les associations de locataires conservent un rôle important – bien au-delà de leur poids électif.
Qu’on les nomme pratiques collaboratives ou autrement, nous avions plusieurs interrogations à leur sujet : quelle est leur genèse ? Quels sont les déterminants sociaux, économiques, culturels, organisationnels de ces pratiques ? Quels sont leurs ressorts ? C’est très important pour les acteurs que nous sommes, car la compréhension de ces mécanismes peut nous faire progresser dans l’intelligence de l’action. C’est justement ce dont il va être question dans le premier atelier de ce séminaire.

1 Toutes les ressources du programme de recherche tels que les actes et les articles issus des différents séminaires sont disponibles en ligne :
https://www.union-habitat.org/centre-de-ressources/habitants-politiques-sociales/dossier-de-la-recherche-les-pratiques

Recherche sur les pratiques collaboratives dans l’habitat social

Sabrina Bresson, Ecole Nationale Supérieure d’Architecture Paris Val de Seine, UMR LAVUE/ Centre de Recherche sur l’Habitat

Trois grandes questions nous ont préoccupé et ont guidé nos investigations pendant ces trois années de recherche :

• Comment définir ces pratiques collaboratives et en proposer une typologie ?
• Quels sont les facteurs sociaux, territoriaux, institutionnels, qui favorisent l’émergence et le développement de ces expériences ou au contraire les entravent ?
• Quelle est leur portée sociale et politique ?
Pour répondre à ces questions, nous avons travaillé avec une équipe issue des trois régions d’enquête (Hauts-de-France, Ile-de-France, PACA) et de quatre établissements d’enseignement supérieur :
• L’Ecole nationale supérieure d’architecture Paris-Val de Seine (Sabrina Bresson)
• L’Université Paris Nanterre (Claire Carriou)
• L’Institut d’Urbanisme et d’Aménagement Régional de l’Université d’Aix-Marseille (Séverine Bonnin-Oliveira)
• La faculté des sciences économiques sociales et des territoires de l’Université de Lille

Au cours de la première année de la recherche, des étudiants des trois universités (Nanterre, Aix-Marseille et Lille) ont été mobilisés pour mener des enquêtes de terrain auprès des neuf bailleurs qui avaient manifesté leur intérêt à contribuer à cette recherche. Notre équipe s’est étoffée au cours du temps. Un post-doctorant a approfondi les enquêtes menées en Hauts-de-France la première année (Antonio Delfini - Université de Lille), une sociologue consultante (Sylvaine Le Garrec) nous a rejoint la deuxième année et deux post-doctorantes ont investigué les terrains de l’Ile-de-France (Yaneira Wilson) et de la région PACA (Camille Floderer).

La crise sanitaire a évidemment marqué notre travail, à la fois dans la réalisation des enquêtes de terrain et dans les échanges de l’équipe. Toutefois, même si le COVID a bouleversé les conditions d’enquête et les pratiques que nous observions, nous avons poursuivi notre travail et nous avons pris le parti d’intégrer ce profond bouleversement dans nos analyses. C’est dans cet objectif que l’USH a organisé, avec les acteurs de terrain, un séminaire très fécond sur cette question en mars 20213.

Avant d’initier la présentation de nos travaux, il nous apparaît nécessaire de revenir un instant sur la terminologie de « pratiques collaboratives ». Nous avons choisi d’utiliser cette expression pour désigner une pluralité de pratiques qui recomposent les relations entre habitants du parc social et entre habitants et organismes Hlm. Cela nous a permis d’intégrer dans notre analyse des pratiques très diversifiées et nommées selon différents termes par les acteurs de terrain.

Nous avons par exemple entendu et utilisé nous-mêmes des vocables assez généraux tels que « expériences », « dynamiques », ou des désignations plus précises comme « dispositifs », « action », « initiatives habitantes » ou encore plus larges comme « participation » ou « collaboration ». L’une de nos préoccupations a été de clarifier ce vocabulaire et de classer les « pratiques collaboratives » en différentes catégories afin de rendre plus lisible leur diversité.
Cependant, les pratiques que nous avons observées ne se rangeaient pas dans des cases bien précises et bien délimitées. Elles gravitaient plutôt – selon un continuum de situations - entre deux pôles opposés :

• D’un côté, les actions initiées et portées par des habitants, que nous avons nommées « les initiatives habitantes »
• De l’autre côté, des actions initiés et portés par des organismes Hlm, que nous avons nommé « dispositifs »

Les « dispositifs » des organismes et « les initiatives habitantes » ne constituent pas deux catégories en soi dans lesquelles on pourrait classer définitivement une « pratique collaborative » observée. La réalité est plus complexe, avec des jeux d’entrecroisement. Certaines initiatives habitantes peuvent évoluer et s’institutionnaliser en partenariat avec le bailleur ou un « tiers » associatif. De même, certains dispositifs initiés par des bailleurs ont vocation à disparaître pour laisser place à une autogestion habitante. Néanmoins, cette distinction est utile pour la compréhension des mécanismes observés.

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